Formation professionnelle : Comment imposer une formation ?

48 heures. C’est le temps dont dispose un salarié pour dire oui ou non à une formation imposée, lorsque la convocation tombe sans crier gare. Derrière cette règle brute, une tension sourde traverse les entreprises : entre nécessité d’adapter les équipes et liberté individuelle, la formation professionnelle devient un terrain d’arbitrage, parfois de crispation.

Un employeur peut bel et bien imposer une formation à un salarié, même sans son aval, lorsque cela relève du fonctionnement habituel du contrat de travail ou répond à une obligation légale qui pèse sur l’entreprise. Refuser sans raison valable de suivre une formation considérée comme obligatoire peut être assimilé à une faute professionnelle, ouvrant la porte à des mesures disciplinaires.

D’autres situations, en revanche, réclament un consentement explicite. C’est le cas lorsque la formation implique une modification profonde du contrat de travail, nouvelle qualification, mobilité imposée, etc. Cette frontière, parfois floue, entre contrainte et choix continue d’alimenter les litiges, ravivant les tensions et les débats sur la place du salarié dans l’entreprise.

Le code du travail encadre strictement la manière dont la formation professionnelle s’organise dans l’entreprise. L’employeur est tenu de former ses salariés, non seulement pour permettre leur adaptation, mais aussi pour accompagner l’évolution des métiers et des compétences.

La formation professionnelle n’est donc pas simplement une possibilité à saisir : elle s’impose comme un droit pour le salarié et une obligation pour l’employeur. Le plan de développement des compétences formalise toutes les actions de formation décidées par l’employeur, qu’elles s’appuient sur un bilan de compétences ou une validation des acquis de l’expérience (VAE), tout dépend des besoins repérés.

La loi distingue clairement deux types de formation. Voici comment elles se répartissent :

  • Formation obligatoire : l’employeur l’impose sans solliciter l’accord du salarié. Refuser une telle formation expose à des sanctions.
  • Formation non obligatoire : celle-ci requiert l’accord écrit du salarié, notamment si elle a lieu hors du temps de travail ou touche à des aspects plus personnels comme le bilan de compétences ou la VAE.

Cette distinction façonne la relation entre employeur et salarié autour de la formation. Le plan de développement des compétences sert d’outil central pour anticiper les mutations technologiques ou organisationnelles, tout en restant dans le cadre légal. La formation à la sécurité, elle, n’est pas négociable : elle engage la responsabilité pénale de l’employeur et sert de rempart contre les accidents.

Salarié ou employeur : quels sont les droits et obligations de chacun face à une formation obligatoire ?

Le contrat de travail et le code du travail délimitent clairement les rôles : l’employeur peut requérir qu’un salarié suive une formation obligatoire pour l’adapter à son poste ou garantir sa sécurité. Nul besoin d’obtenir un accord préalable dans ce cas. Ce pouvoir s’exerce à l’embauche, lors d’un changement de poste ou au retour d’un long arrêt. Un refus injustifié peut être lourd de conséquences, avec des sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave, sauf à justifier d’un motif légitime reconnu.

Le plan de développement des compétences liste les formations prévues par l’entreprise. Lorsqu’il s’agit de dispositifs particuliers, bilan de compétences, VAE, ou formations en dehors du temps de travail,, l’accord écrit du salarié est requis. Cela protège la vie privée et permet au salarié de mieux organiser son temps. Ici, refuser n’entraîne aucune sanction, la décision appartient au salarié, à condition de respecter la procédure.

L’entretien professionnel, à organiser tous les deux ans, joue un rôle central. Ce moment d’échange sert à envisager l’évolution professionnelle, à pointer les besoins de formation ou à préparer une mobilité interne. Le salarié peut solliciter une formation via le compte personnel de formation (CPF) ou demander un projet de transition professionnelle. L’employeur, de son côté, peut accepter ou refuser, à condition de motiver sa réponse en cohérence avec l’organisation du travail.

Ce dialogue, encadré par la loi, cherche à trouver un équilibre entre cohésion collective et ambitions individuelles, tout en garantissant la continuité de l’activité.

Refuser une formation : quels risques et quelles conséquences pour le salarié ?

Si la formation obligatoire est imposée pour l’adaptation au poste ou la sécurité, le salarié qui refuse prend un risque sérieux. Le code du travail est formel : ce type de formation ne se discute pas. Un refus non justifié peut entraîner avertissement, mise à pied, voire licenciement pour faute grave.

Certaines situations permettent cependant de refuser sans conséquence. Le motif légitime couvre des cas comme une discrimination, une modification du contrat de travail non acceptée, ou encore un défaut de prise en charge des frais ou des obligations familiales incontournables. Dans de tels cas, le salarié peut défendre sa position devant le conseil de prud’hommes.

À l’inverse, une formation non obligatoire, bilan de compétences, VAE, formation hors temps de travail, ne peut être imposée. Ici, refuser n’a aucune conséquence disciplinaire, ce qui protège la liberté individuelle et préserve l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.

Pour résumer les différentes situations, voici les risques à connaître :

  • Refus injustifié d’une formation obligatoire : risque de sanction disciplinaire ou licenciement.
  • Refus d’une formation non obligatoire : aucune conséquence disciplinaire.
  • Refus pour motif légitime : le salarié bénéficie d’une protection et d’un recours possible.

La transparence des échanges, la vigilance sur la motivation des décisions et la traçabilité des discussions sont autant d’atouts pour éviter les conflits et s’assurer du respect des droits de chacun.

Manager remettant un document de formation à un employé

Favoriser le dialogue pour transformer la contrainte en opportunité professionnelle

La formation professionnelle ne se limite pas à une case à cocher. Elle façonne le présent et l’avenir du salarié et de l’entreprise. Même imposée, chaque formation peut devenir un tremplin pour élargir ses compétences et ouvrir de nouvelles perspectives. L’entretien professionnel, obligatoire tous les deux ans, en est la preuve vivante : il permet d’anticiper les transformations, d’identifier les besoins spécifiques, de discuter sans détour des possibilités de reclassement ou d’alternance.

Tout repose sur la qualité du dialogue social. Qu’on soit dans une petite structure ou au sein d’un grand groupe, la discussion entre employeur et salarié fait émerger des solutions adaptées : adaptation des contenus, prise en compte des contraintes personnelles, intégration au plan de développement des compétences. C’est ce dialogue qui nourrit la confiance et transforme une obligation réglementaire en levier d’évolution professionnelle.

L’entreprise y trouve son compte : en investissant dans la formation, elle renforce son attractivité et fidélise ses équipes. Le salarié, lui, consolide son parcours, sécurise son emploi et s’ouvre à de nouveaux rôles. Même imposée, la formation s’inscrit dans une dynamique de co-construction et d’évolution permanente.

Pour renforcer cette dynamique, plusieurs axes sont à privilégier :

  • Identifier les besoins lors des entretiens professionnels
  • Adapter le parcours de formation selon les contextes individuels
  • Impliquer le salarié dans la réflexion sur le développement de ses compétences

Quand le dialogue prend le pas sur la contrainte, la formation cesse d’être un passage obligé pour devenir le moteur d’une progression partagée. C’est là que la contrainte se mue en opportunité et redessine, pour chacun, la trajectoire professionnelle à venir.

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